La procédure de négociation en matière de vote électronique
SOMMAIRE
I – La négociation d’un accord collectif d’entreprise ou de groupe autorisant le recours au vote électronique
- La négociation de deux accords distincts sur le vote électronique
- Les conditions de validité de l’accord d’entreprise sur le vote électronique
- Les mentions obligatoires à faire figurer dans l’accord collectif d’entreprise
- Combinaison du vote électronique avec d’autres modes de votes prévus par l’accord d’entreprise
- Le dépôt impératif de l’accord d’entreprise auprès de la DREETS
II – La négociation d’un protocole d’accord préélectoral
- Les conditions de validité du protocole d’accord préélectoral
- Les modalités de mise en œuvre fixées par l’employeur ou, à défaut, par le tribunal judiciaire en l’absence de protocole d’accord préélectoral valide
- Les mentions à faire figurer dans le protocole d’accord préélectoral (description du système de vote électronique retenu et du déroulement du vote)
- Les formalités à remplir par l’employeur dans le cadre du protocole d’accord préélectoral (déclaration au titre du RGPD, information et formation des représentants élus et salariés sur le système de vote, recours préalable à une expertise indépendante)
III – La négociation dérogatoire d’un accord d’entreprise ou de groupe autorisant le recours au vote électronique
- Négociation d’un accord avec les représentants élus mandatés par une organisation représentative de la branche
- Négociation d’un accord avec les représentants élus non mandatés par une organisation représentative dans la branche
- Négociation d’un accord avec un salarié non élu mandaté par une organisation représentative dans la branche
IV – La négociation dérogatoire d’un accord d’entreprise ou de groupe autorisant le recours au vote électronique
I – La négociation d’un accord collectif d’entreprise ou de groupe autorisant le recours au vote électronique
La loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique n°2004-575 a introduit le vote électronique pour l’élection des délégués du personnel et des représentants du personnel au comité d’entreprise désormais le comité social et économique (CSE) prévu à l’ article L2314-26 du Code du travail
Art. L.2314-26 C. trav.
« L’élection a lieu au scrutin secret sous enveloppe.
Elle peut également avoir lieu par vote électronique, selon les modalités fixées par un décret en Conseil d’Etat pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, si un accord d’entreprise ou, à défaut, l’employeur le décide.
Il est procédé à des votes séparés pour les membres titulaires et les membres suppléants, dans chacune des catégories professionnelles formant des collèges distincts ».
– La négociation de deux accords distincts sur le vote électronique
L’employeur a pour obligation de négocier deux accords distincts :
- En premier lieu, un accord d’entreprise prévoyant le recours au vote électronique
- En second lieu, un protocole d’accord préélectoral prévoyant les modalités de mise en œuvre du vote électronique
En ce qui concerne la négociation de l’accord d’entreprise sur le recours au vote électronique, l’employeur est tenu de convoquer les seules organisations syndicales représentatives ayant désignées un délégué syndical dans l’entreprise.
Art. L.2232-16 al. 1 C. trav.
« La convention ou les accords d’entreprise sont négociés entre l’employeur et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l’entreprise ».
En ce qui concerne la négociation du protocole d’accord préélectoral sur les modalités de mise en œuvre du vote électronique, l’employeur est tenu de convoquer l’ensemble des organisations syndicales représentatives et non représentatives.
Art. L.2314-5 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017
« Sont informées, par tout moyen, de l’organisation des élections et invitées à négocier le protocole d’accord préélectoral et à établir les listes de leurs candidats aux fonctions de membre de la délégation du personnel les organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise ou l’établissement concernés ».
– Les conditions de validité de l’accord d’entreprise sur le vote électronique
Cet accord d’entreprise est soumis aux seules conditions de validité des accords collectifs prévues à l’article L.2321-9 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017.
Art. L.2321-9 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017
Modifié par l’Ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017
« La validité d’une convention ou d’un accord d’entreprise ou d’établissement conclu par le conseil d’entreprise est subordonnée à sa signature par la majorité des membres titulaires élus du conseil ou par un ou plusieurs membres titulaires ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles. Pour l’appréciation de ce dernier seuil, il est tenu compte des suffrages recueillis lors du premier tour des élections pour les élus au premier tour de scrutin, et de ceux recueillis lors du second tour pour les élus au second tour de scrutin ».
– Les mentions obligatoires à faire figurer dans l’accord collectif d’entreprise
L’accord collectif doit en outre :
- Faire mention d’un cahier des charges relative à la conception et la mise en place du système de vote électronique
- Préciser si le système de vote électronique est confié à un prestataire externe ou est conçu par l’entreprise en interne
Art. R.2314-6 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« La conception et la mise en place du système de vote électronique peuvent être confiées à un prestataire choisi par l’employeur sur la base d’un cahier des charges respectant les dispositions du présent paragraphe.
Le système retenu assure la confidentialité des données transmises, notamment de celles des fichiers constitués pour établir les listes électorales des collèges électoraux, ainsi que la sécurité de l’adressage des moyens d’authentification, de l’émargement, de l’enregistrement et du dépouillement des votes ».
– Combinaison du vote électronique avec d’autres modes de votes prévus par l’accord d’entreprise
L’accord d’entreprise peut prévoir un vote mixte avec le vote électronique combiné au vote à bulletin secret sous enveloppe.
Par ailleurs, l’accord d’entreprise peut expressément exclure le vote secret sous enveloppe.
Art. R.2314-5 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« L’élection des membres de la délégation du personnel du comité social et économique peut être réalisée par vote électronique sur le lieu de travail ou à distance.
Sans préjudice des dispositions relatives au protocole d’accord préélectoral prévues aux articles L. 2314-5 et suivants, la possibilité de recourir à un vote électronique est ouverte par un accord d’entreprise ou par un accord de groupe. A défaut d’accord, l’employeur peut décider de ce recours qui vaut aussi, le cas échéant, pour les élections partielles se déroulant en cours de mandat ».
– Le dépôt impératif de l’accord d’entreprise auprès de la DREETS
L’accord d’entreprise prévoyant le recours au vote électronique doit être déposé auprès de la DREETS avant la conclusion du protocole d’accord préélectoral.
Dans le cas contraire, si l’accord d’entreprise est déposé après la signature du protocole d’accord préélectoral, les élections pourront alors être annulées.
Dans un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 28 septembre 2011 n°11-60.028, la cour casse la décision du tribunal d’instance au motif « qu’il constatait que l’accord d’entreprise conclu au sein de la société Hub Telecom pour le recours au vote électronique prévoyait qu’il n’entrait en vigueur qu’au moment de son dépôt auprès des administrations concernées, ce dont il résultait que l’accord d’entreprise n’était pas applicable lors de la signature du protocole préélectoral ».
Ainsi, il s’agit de deux négociations bien distinctes qui doivent être menées dans l’ordre défini par la loi. Il n’est pas envisageable de négocier le même jour un accord collectif sur le vote électronique et un protocole d’accord préélectoral.
II – La négociation d’un protocole d’accord préélectoral
– Les conditions de validité du protocole d’accord préélectoral
Le protocole d’accord préélectoral négocié est soumis à des conditions de validité différentes de celles exigées pour l’accord collectif d’entreprise. La validité du protocole d’accord préélectoral est soumise à sa signature par la majorité des organisations professionnelles représentatives dans l’entreprise ayant participé à sa négociation.
Art. L.2314-6 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017
« Sauf dispositions législatives contraires, la validité du protocole d’accord préélectoral conclu entre l’employeur et les organisations syndicales intéressées est subordonnée à sa signature par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l’entreprise ».
La jurisprudence distingue bien les conditions de validité de l’accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique et les conditions de validité du protocole d’accord préélectoral prévoyant les modalités d’organisation et de déroulement du vote électronique.
Selon un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 28 septembre 2011 n°10-27.370, les modalités d’organisation et de déroulement du vote électronique prévue par le protocole d’accord préélectoral sont soumis à la condition de la double majorité alors que l’autorisation du recours au vote électronique prévue par l’accord d’entreprise reste soumis aux conditions de validité de l’article L.2321-9 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 (signature par des syndicats ayant obtenu au moins 50 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des membres titulaires du comité d’entreprise et absence d’opposition majoritaire).
Selon la cour, « si le protocole d’accord préélectoral fixant les modalités de mise en œuvre du vote électronique doit, pour être valable, satisfaire aux conditions de majorité prévues aux articles L. 2314-3-1et L. 2324-3-1 du code du travail, l’accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique est soumis aux seules conditions de validité prévues à l’article L.2321-9 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 ».
– Les modalités de mise en œuvre fixées par l’employeur ou, à défaut, par le tribunal judiciaire en l’absence de protocole d’accord préélectoral valide
La jurisprudence est venue apporter des précisions quant à la question de savoir si l’absence de protocole d’accord préélectoral valide empêche le recours au vote électronique.
Dans un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 4 juin 2014 n° 13-18.914, la chambre sociale de la cour de cassation a estimé que lorsque qu’un accord collectif prévoit le recours au vote électronique, en l’absence de protocole d’accord préélectoral valide, ses modalités de mise en œuvre peuvent intervenir sur décision unilatérale de l’employeur ou, à défaut, sur décision du tribunal d’instance, dans le respect des conditions prévues par l’accord d’entreprise. La cour casse la décision du tribunal d’instance qui « retient que la décision de recours au vote électronique doit être confirmée dans le protocole préélectoral et qu’il n’appartient pas au tribunal, en l’absence d’accord majoritaire sur ce point, de décider de la mise en place d’un vote exclusivement électronique ».
– Les mentions à faire figurer dans le protocole d’accord préélectoral (description du système de vote électronique retenu et du déroulement du vote)
Le protocole d’accord préélectoral prévoit l’ensemble des modalités de mise en œuvre du vote électronique pour les élections.
Certaines mentions doivent figurer dans le protocole d’accord préélectoral :
- D’une part, il est nécessaire d’insérer une clause spécifique dans le protocole d’accord préélectoral relative à l’accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique et l’identité du prestataire à qui la conception et la mise en place du système de vote ont été confiées.
- D’autre part, le protocole d’accord préélectoral doit contenir une description détaillée du système de vote élaboré et du déroulement des opérations électorales.
Art. R.2314-13 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« Le protocole d’accord préélectoral mentionne la conclusion de l’accord d’entreprise ou de l’accord de groupe autorisant le recours au vote électronique et, s’il est déjà arrêté, le nom du prestataire choisi pour le mettre en place.
Il comporte en annexe la description détaillée du fonctionnement du système retenu et du déroulement des opérations électorales ».
– Les formalités à remplir par l’employeur dans le cadre du protocole d’accord préélectoral (déclaration à la CNIL, information et formation des représentants élus et salariés sur le système de vote, recours préalable à une expertise indépendante)
Dès lors que les modalités du système de vote électronique retenu ont fait l’objet d’un protocole d’accord préélectoral, l’employeur est tenu de remplir certaines formalités avant tout mise en œuvre du système de vote.
Il est tenu à :
- Une déclaration du système de vote électronique auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Dès l’accomplissement de cette formalité, l’employeur doit en avertir les organisations syndicales représentatives incluses dans le périmètre de l’accord.
Art. R.2314-11 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« L’employeur informe les organisations syndicales de salariés représentatives dans l’entreprise ou dans le ou les établissements concernés, de l’accomplissement des formalités déclaratives préalables auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ».
- Une obligation de formation et d’information de l’ensemble des utilisateurs du système de vote : les électeurs, les représentants du personnel et le bureau de vote.
En ce qui concerne la formation, il revient à l’employeur de former les représentants du personnel, les délégués syndicaux et le bureau de vote au système de vote prévu. Toutefois, dans la mesure où l’employeur a recours à un prestataire de service pour la mise en place du système de vote, il revient à ce dernier de dispenser la formation. Celle-ci porte sur le fonctionnement du système vote, le déroulement du scrutin et son dépouillement.
En ce qui concerne l’information, l’employeur doit envoyer une notice d’information détaillée sur le déroulement des opérations électorales à l’ensemble des salariés de l’entreprise (et pas uniquement aux électeurs).
Cette notice d’information peut être envoyée avec les moyens d’authentification aux électeurs.
- Une expertise indépendante du système de vote retenu. Avant toute modification substantielle de sa conception, le système doit faire l’objet d’une expertise indépendante afin d’en vérifier la conformité par rapport aux dispositions légales : art. R. 2314-8 à R. 2314-11 C. trav. (élection DP) et art. R. 2324-4 à R.2324-7 C. trav. (élection CE).
Art. R.2314-9 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« Préalablement à sa mise en place ou à toute modification substantielle de sa conception, le système de vote électronique est soumis à une expertise indépendante destinée à vérifier le respect des articles R. 2314-5 à R. 2314-8. Le rapport de l’expert est tenu à la disposition de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Les prescriptions de ces mêmes articles s’imposent également aux personnes chargées de la gestion et de la maintenance du système informatique ».
II – La négociation d’un protocole d’accord préélectoral
– Les conditions de validité du protocole d’accord préélectoral
Le protocole d’accord préélectoral négocié est soumis à des conditions de validité différentes de celles exigées pour l’accord collectif d’entreprise. La validité du protocole d’accord préélectoral est soumise à sa signature par la majorité des organisations professionnelles représentatives dans l’entreprise ayant participé à sa négociation.
Art. L.2314-6 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017
« Sauf dispositions législatives contraires, la validité du protocole d’accord préélectoral conclu entre l’employeur et les organisations syndicales intéressées est subordonnée à sa signature par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l’entreprise ».
La jurisprudence distingue bien les conditions de validité de l’accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique et les conditions de validité du protocole d’accord préélectoral prévoyant les modalités d’organisation et de déroulement du vote électronique.
Selon un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 28 septembre 2011 n°10-27.370, les modalités d’organisation et de déroulement du vote électronique prévue par le protocole d’accord préélectoral sont soumis à la condition de la double majorité alors que l’autorisation du recours au vote électronique prévue par l’accord d’entreprise reste soumis aux conditions de validité de l’article L.2321-9 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 (signature par des syndicats ayant obtenu au moins 50 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des membres titulaires du comité d’entreprise et absence d’opposition majoritaire).
Selon la cour, « si le protocole d’accord préélectoral fixant les modalités de mise en œuvre du vote électronique doit, pour être valable, satisfaire aux conditions de majorité prévues aux articles L. 2314-3-1et L. 2324-3-1 du code du travail, l’accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique est soumis aux seules conditions de validité prévues à l’article L.2321-9 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 ».
– Les modalités de mise en œuvre fixées par l’employeur ou, à défaut, par le tribunal judiciaire en l’absence de protocole d’accord préélectoral valide
La jurisprudence est venue apporter des précisions quant à la question de savoir si l’absence de protocole d’accord préélectoral valide empêche le recours au vote électronique.
Dans un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 4 juin 2014 n° 13-18.914, la chambre sociale de la cour de cassation a estimé que lorsque qu’un accord collectif prévoit le recours au vote électronique, en l’absence de protocole d’accord préélectoral valide, ses modalités de mise en œuvre peuvent intervenir sur décision unilatérale de l’employeur ou, à défaut, sur décision du tribunal d’instance, dans le respect des conditions prévues par l’accord d’entreprise. La cour casse la décision du tribunal d’instance qui « retient que la décision de recours au vote électronique doit être confirmée dans le protocole préélectoral et qu’il n’appartient pas au tribunal, en l’absence d’accord majoritaire sur ce point, de décider de la mise en place d’un vote exclusivement électronique ».
– Les mentions à faire figurer dans le protocole d’accord préélectoral (description du système de vote électronique retenu et du déroulement du vote)
Le protocole d’accord préélectoral prévoit l’ensemble des modalités de mise en œuvre du vote électronique pour les élections.
Certaines mentions doivent figurer dans le protocole d’accord préélectoral :
- D’une part, il est nécessaire d’insérer une clause spécifique dans le protocole d’accord préélectoral relative à l’accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique et l’identité du prestataire à qui la conception et la mise en place du système de vote ont été confiées.
- D’autre part, le protocole d’accord préélectoral doit contenir une description détaillée du système de vote élaboré et du déroulement des opérations électorales.
Art. R.2314-13 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« Le protocole d’accord préélectoral mentionne la conclusion de l’accord d’entreprise ou de l’accord de groupe autorisant le recours au vote électronique et, s’il est déjà arrêté, le nom du prestataire choisi pour le mettre en place.
Il comporte en annexe la description détaillée du fonctionnement du système retenu et du déroulement des opérations électorales ».
– Les formalités à remplir par l’employeur dans le cadre du protocole d’accord préélectoral (déclaration au titre du RGPD, information et formation des représentants élus et salariés sur le système de vote, recours préalable à une expertise indépendante)
Dès lors que les modalités du système de vote électronique retenu ont fait l’objet d’un protocole d’accord préélectoral, l’employeur est tenu de remplir certaines formalités avant tout mise en œuvre du système de vote.
Il est tenu à :
- Une déclaration au titre du RGPD. Dès l’accomplissement de cette formalité, l’employeur doit en avertir les organisations syndicales représentatives incluses dans le périmètre de l’accord.
Art. R.2314-11 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« L’employeur informe les organisations syndicales de salariés représentatives dans l’entreprise ou dans le ou les établissements concernés, de l’accomplissement des formalités déclaratives préalables auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ».
- Une obligation de formation et d’information de l’ensemble des utilisateurs du système de vote : les électeurs, les représentants du personnel et le bureau de vote.
En ce qui concerne la formation, il revient à l’employeur de former les représentants du personnel, les délégués syndicaux et le bureau de vote au système de vote prévu. Toutefois, dans la mesure où l’employeur a recours à un prestataire de service pour la mise en place du système de vote, il revient à ce dernier de dispenser la formation. Celle-ci porte sur le fonctionnement du système vote, le déroulement du scrutin et son dépouillement.
En ce qui concerne l’information, l’employeur doit envoyer une notice d’information détaillée sur le déroulement des opérations électorales à l’ensemble des salariés de l’entreprise (et pas uniquement aux électeurs).
Cette notice d’information peut être envoyée avec les moyens d’authentification aux électeurs.
- Une expertise indépendante du système de vote retenu. Avant toute modification substantielle de sa conception, le système doit faire l’objet d’une expertise indépendante afin d’en vérifier la conformité par rapport aux dispositions légales : art. R. 2314-8 à R. 2314-11 C. trav. (élection DP) et art. R. 2324-4 à R.2324-7 C. trav. (élection CE).
Art. R.2314-9 du Décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017
« Préalablement à sa mise en place ou à toute modification substantielle de sa conception, le système de vote électronique est soumis à une expertise indépendante destinée à vérifier le respect des articles R. 2314-5 à R. 2314-8. Le rapport de l’expert est tenu à la disposition de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Les prescriptions de ces mêmes articles s’imposent également aux personnes chargées de la gestion et de la maintenance du système informatique ».
III – La négociation dérogatoire d’un accord d’entreprise ou de groupe autorisant le recours au vote électronique
Projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs adopté le 20 juillet 2016
Négociation avec des salariés mandatés (art.17)
Le projet de la loi El Khomri du 20 juillet 2016 modifie les règles de négociation avec les salariés mandatés, déjà modifiées par la loi Rebsamen du 17 août 2015. Désormais, la loi du 20 juillet 2016 élargit les thèmes de négociation ouverts au salarié mandaté par une organisation syndicale, ils ne sont plus limités aux mesures dont la loi subordonne la mise en œuvre à un accord collectif.
Egalement, la validation de l’accord collectif négocié avec les représentants du personnel mandatés par une organisation syndicale de la branche est supprimée. L’accord collectif est simplement transmis à la commission paritaire de branche à titre d’information et cette formalité ne conditionne pas le dépôt et l’entrée en vigueur de l’accord collectif.
TITRE II FAVORISER UNE CULTURE DU DIALOGUE ET DE LA NÉGOCIATION
CHAPITRE I ER Des règles de négociation plus souples et le renforcement de la loyauté de la négociation
Article 17
5° Après l’article L. 2232-24, il est inséré un article L. 2232-24-1 ainsi rédigé :
Art. L. 2232-24-1. – Les accords négociés et conclus par un ou plusieurs salariés mandatés mentionnés à l’article L. 2232-24 peuvent porter sur toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement sur le fondement du présent code. »
La loi Rebsamen du 17 août 2015 prévoit des acteurs de négociation dérogatoire en l’absence de délégué syndical, acteur légitime de la négociation collective, désigné dans l’entreprise.
La loi offre trois options pour conclure un accord collectif d’entreprise autorisant le recours au vote électronique :
- Soit un accord négocié avec des représentants élus mandatés et approuvé par référendum
- Soit un accord négocié avec des représentants élus non mandatés et approuvé par la Commission de validation de la branche
- Soit un accord négocié avec un salarié non élu mandaté et approuvé par référendum
– Négociation d’un accord avec les représentants élus mandatés par une organisation représentative de la branche
La loi Rebsamen a ouvert la faculté de négociation avec les représentants élus mandatés par la branche dans toutes les entreprises sans condition d’effectif.
Les élus peuvent négocier et conclure un accord collectif autorisant le recours au vote électronique s’ils sont expressément mandatés à cet effet par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche dont relève l’entreprise ou, à défaut, par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Toutefois, une même organisation ne peut mandater qu’un seul salarié.
Cette négociation avec les élus mandatés porte sur toutes les questions ouvertes à la négociation d’entreprise et plus seulement sur des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif.
L’accord conclu avec les représentants élus mandatés est réputé parfait dès sa signature et n’a pas ainsi à être validé par une commission paritaire de branche.
Art. L.2312-19 de l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017
« Un accord d’entreprise, conclu dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 2232-12 ou, en l’absence de délégué syndical, un accord entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, peut définir : .
1° Le contenu, la périodicité et les modalités des consultations récurrentes du comité social et économique mentionnées à l’article L. 2312-17 ainsi que la liste et le contenu des informations nécessaires à ces consultations ;
2° Le nombre de réunions annuelles du comité prévues à l’article L. 2315-27, qui ne peut être inférieur à six ;
3° Les niveaux auxquelles les consultations sont conduites et, le cas échéant, leur articulation ;
4° Les délais mentionnés à l’article L. 2312-15 dans lesquels les avis du comité sont rendus.
Il peut également prévoir la possibilité pour le comité social et économique d’émettre un avis unique portant sur tout ou partie des thèmes de consultation prévus à l’article L. 2312-17 ».
Art. L.2312-17 C. trav.
Créé par l’Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017
« Le comité social et économique est consulté dans les conditions définies à la présente section sur :
1° Les orientations stratégiques de l’entreprise ;
2° La situation économique et financière de l’entreprise ;
« 3° La politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi ».
– Négociation d’un accord avec les représentants élus non mandatés par une organisation représentative dans la branche
La loi Rebsamen n’a pas supprimé la négociation avec les représentants élus non mandatés mais privilégie la négociation avec les élus mandatés par la branche.
La négociation avec les élus non mandatés est possible qu’en l’absence de mandatement syndical et pour toutes les entreprises, sans condition d’effectif.
Art. L. 2232-22 C. trav.
Modifié par Loi n°2015-994 du 17 août 2015 – art. 21
« En l’absence de représentant élu du personnel mandaté en application de l’article L. 2232-21, leif.s représentants élus titulaires du personnel au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel ou à l’instance mentionnée à l’article L. 2391-1 ou, à défaut, les délégués titulaires du personnel qui n’ont pas été expressément mandatés par une organisation mentionnée à l’article L. 2232-21 peuvent négocier et conclure des accords collectifs de travail.
Cette négociation ne porte que sur les accords collectifs de travail relatifs à des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, à l’exception des accords collectifs mentionnés à l’article L.1233-21. La validité des accords conclus en application du présent article est subordonnée, d’une part, à leur signature par des membres titulaires élus au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel ou, à défaut, par des délégués du personnel titulaires représentant la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles et, d’autre part, à l’approbation par la commission paritaire de branche. Si l’une des deux conditions n’est pas remplie, l’accord est réputé non écrit. La commission contrôle que l’accord collectif n’enfreint pas les dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles applicables.
A défaut de stipulations différentes d’un accord de branche, la commission paritaire de branche comprend un représentant titulaire et un représentant suppléant de chaque organisation syndicale de salariés représentative dans la branche et un nombre égal de représentants des organisations professionnelles d’employeurs ».
Selon les nouvelles dispositions de l’article L. 2232-22 du Code du travail issues de la loi Rebsamen, la commission paritaire de branche doit expressément valider l’accord collectif négocié par les représentants élus non mandatés.
Le silence gardé par la commission paritaire de branche ne peut pas être interprété comme une validation tacite de l’accord d’entreprise autorisant le vote électronique.
Toutefois, la validation de l’accord conclu par les élus non mandatés est soumise à une double condition.
D’une part, l’accord doit être signé par les élus représentant la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles (condition de validité renforcée non pas 30% mais 50% des suffrages exprimés) et approuvé par la commission paritaire de branche.
D’autre part, la négociation avec les élus non mandatés ne peut porter que sur les accords collectifs de travail relatifs à des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif.
Or, l’article L. 2314-21 alinéa 2 du Code du travail dispose que la mise en œuvre du vote par voie électronique est subordonnée à la conclusion d’un accord d’entreprise.
Dés lors, il est possible de négocier et conclure avec les représentants élus non mandatés un accord d’entreprise autorisant le recours au vote électronique pour les élections professionnelles.
– Négociation d’un accord avec un salarié non élu mandaté par une organisation représentative dans la branche
En cas d’absence de représentants élus du personnel dans l’entreprise ou lorsque aucun élu n’a manifesté son souhait de négocier, l’employeur peut conclure directement un accord collectif avec un salarié non élu mandaté par une organisation représentative dans la branche.
Il est à noter que la loi Rebsamen du 17 août 2016 ouvre aux entreprises de moins de 11 salariés la possibilité de recourir à un salarié non élu mandaté pour signer un accord collectif.
Art. L.2232-24 C. trav.
Modifié par Loi n°2015-994 du 17 août 2015 – art. 21
« Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical lorsque, à l’issue de la procédure définie à l’article L. 2232-23-1, aucun élu n’a manifesté son souhait de négocier, les accords d’entreprise ou d’établissement peuvent être négociés et conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche ou, à défaut, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel. Ces accords collectifs portent sur des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, à l’exception des accords collectifs visés à l’article L. 1233-21. A cet effet, une même organisation syndicale ne peut mandater qu’un seul salarié.
Les organisations syndicales représentatives dans la branche de laquelle relève l’entreprise ou, à défaut, les organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel sont informées par l’employeur de sa décision d’engager des négociations.
Le présent article s’applique de droit dans les entreprises dépourvues de délégué syndical dans lesquelles un procès-verbal de carence a établi l’absence de représentants élus du personnel ainsi que dans les entreprises de moins de onze salariés ».
L’accord conclu avec le salarié non élu mandaté doit être approuvé par les salariés par référendum à la majorité des suffrages exprimés.
Art. L.2232-27 C. trav.
Modifié par Loi n°2008-789 du 20 août 2008 – art. 9
« L’accord signé par un salarié mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans des conditions déterminées par décret et dans le respect des principes généraux du droit électoral. Faute d’approbation, l’accord est réputé non écrit ».
IV – Le recours au vote électronique à l’initiative de l’employeur à défaut d’accord collectif
La Cour de cassation a rappelé par un arrêt en date du 13 janvier 2020 (pourvoi n° 19-23.533) l’interprétation à donner à la mention de la loi « à défaut », précisant qu’il ne peut s’agir d’une simple alternative. Ainsi, ce n’est que « lorsque, à l’issue d’une tentative loyale de négociation, un accord collectif n’a pu être conclu que l’employeur peut prévoir par décision unilatérale la possibilité et les modalités d’un vote électronique ».
Autrement dit, l’employeur qui souhaite instaurer le vote électronique dans son entreprise doit dans un premier temps privilégier la négociation collective organisées loyalement, soit par le biais de négociation préalable non bâclées ou simplement formelles. Ce n’est que, dans un second temps, en cas d’échec des négociations (un PV de désaccord pourrait utilement être formalisé à des fins probatoires), qu’une décision unilatérale de recours au vote électronique par l’employeur pourrait être prise.
La Cour précise enfin que « dès lors que le législateur a expressément prévu qu’à défaut d’accord collectif, le recours au vote électronique pouvait résulter d’une décision unilatérale de l’employeur, cette décision unilatérale peut, en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise ou dans le groupe, être prise par l’employeur sans qu’il soit tenu de tenter préalablement une négociation selon les modalités dérogatoires ».